La voie maritime du Saint-Laurent (voie navigable des Grands Lacs) est le système d’écluses, de canaux et de voies reliant les Grands Lacs et le fleuve Saint-Laurent à l’océan Atlantique. La construction de canaux de plus en plus grands le long du fleuve Saint-Laurent a commencé dès 1783. En 1900, un réseau complet de canaux à faible tirant d’eau permettait une navigation ininterrompue du lac Supérieur à Montréal.
La voie navigable, longue de quelque 3 700 km de l’île d’Anticosti à la tête du lac Supérieur, autorise des navires d’une longueur maximale de 225,5 m, d’une largeur de 23,8 m et d’un tirant d’eau maximal (c’est-à-dire, la distance entre la surface de l’eau et le fond du navire) de 8,1 m de naviguer de Montréal à Duluth, au Minnesota, sur le lac Supérieur. La majorité des marchandises qui transitent par la Voie maritime sont du minerai de fer, du charbon et d’autres produits miniers, suivis de produits agricoles, d’autres marchandises en vrac (p. ex., produits pétroliers et ciment) et de produits finis (p. ex., fer et acier). Environ 44 millions de tonnes de marchandises transitent par la Voie maritime chaque année, ce qui contraste avec la moyenne annuelle d’environ 11 millions de tonnes dans les années 1950.
Construction
Entre 1913 et 1932, le canal Welland (entre les lacs Érié et Ontario) a été reconstruit, mais les États-Unis étaient réticents à s’engager dans un projet plus vaste, c’est-à-dire à reconstruire les canaux Montréal-lac Ontario. Une menace du gouvernement canadien en 1951 de construire une voie maritime entièrement sur le territoire canadien a abouti à un accord final en 1954. La construction de la Voie maritime et du projet énergétique du Saint-Laurent débute le 10 août 1954. Outre la construction de sept écluses et l’approfondissement des chenaux de navigation jusqu’à une profondeur de 8,2 m, le projet comprend également la construction de la centrale électrique Moses-Saunders de 2 090 mégawatts près de Cornwall, en Ontario. La Voie maritime a été ouverte au trafic commercial le 25 avril 1959. Le 26 juin 1959, le premier ministre John Diefenbaker, le président Dwight D. Eisenhower et la reine Elizabeth II ont assisté à l’inauguration officielle.
La construction de la Voie maritime a été un exploit monumental en matière d’ingénierie et de construction. En plus des travaux primaires nécessaires à la création de la Voie maritime, des travaux auxiliaires, comme la construction de ponts et de tunnels importants, ont été réalisés à Montréal, Beauharnois, Cornwall et Massena. De plus, la création du lac Saint-Laurent a entraîné l’inondation de 15 400 hectares et a nécessité le déplacement d’autoroutes, de neuf petites communautés et de certaines parties des villes d’Iroquois et de Morrisburg, en Ontario. En tout, plus de 525 habitations et 6 500 personnes, 64 km de voies ferrées et 56 km d’autoroute ont été déplacés, et deux nouvelles communautés ont été créées en Ontario, Ingleside et Long Sault. (Voir aussi Les villages perdus.)
Opération
L’Administration de la voie maritime du Saint-Laurent, une société d’État fédérale, a été créée par une loi du Parlement en 1954 pour construire, exploiter et entretenir la partie canadienne de la voie navigable entre Montréal et le lac Ontario, y compris les écluses en territoire canadien (cinq des sept) et aussi le canal Welland. En 1998, une loi du Parlement a permis que la partie canadienne de la Voie maritime soit exploitée par les utilisateurs de la Voie maritime et d’autres parties prenantes sous la forme d’une société sans but lucratif (Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent) sous contrat avec le gouvernement canadien.
Le gouvernement américain a formé la St Lawrence Seaway Development Corp pour exploiter les deux écluses près de Massena, dans l’État de New York. Les quatre écluses américaines sur la rivière Sainte-Marie sont exploitées par le US Corps of Engineers.
Sections
La section Montréal-lac Ontario, que l’on considère souvent comme l’ensemble de la Voie maritime, se divise naturellement en quatre parties : les sections Lachine, Soulanges, Lac Saint-François et Rapides internationaux. La section de Lachine comprend le canal de la Rive-Sud, long de 33 km, et les écluses de Saint-Lambert et de Côte-Sainte-Catherine qui contournent les rapides de Lachine. Ces deux écluses assurent une élévation totale de 13,7 m du niveau du lac Saint-Louis.
La section Soulanges, comprenant le canal de Beauharnois de 25,7 km, comprend les deux écluses de Beauharnois, qui assurent une élévation totale de 25 m pour franchir le barrage hydroélectrique de Beauharnois. La troisième partie, la section du lac Saint-François, s’étend sur 46,7 km de l’extrémité ouest du canal de Beauharnois à un point situé juste à l’est de Cornwall.
Le quatrième segment, la section des rapides internationaux, s’étend sur 70,8 km de Cornwall à Prescott. Il comprend le canal maritime Wiley-Dondero, long de 16 km, et les deux écluses Snell et Eisenhower, propriété des États-Unis, près de Massena, dans l’État de New York. Ces deux écluses permettent d’élever de quelque 26 m le niveau du lac Saint-Laurent. À l’extrémité ouest de ce lac, l’écluse d’Iroquois, située à Iroquois, en Ontario, et adjacente au barrage régulateur d’Iroquois, permet de contrôler le niveau du lac Saint-Laurent par rapport à celui du lac Ontario. À l’ouest de l’écluse d’Iroquois, des travaux de dragage supplémentaires ont été nécessaires pour achever la Voie maritime jusqu’au lac Ontario. Ensemble, toutes les écluses entre le lac Ontario et Montréal soulèvent un navire vers l’ouest d’environ 69 m.
Entre les lacs Ontario et Érié, le canal Welland contourne les chutes du Niagara. Ses huit écluses soulèvent un navire en direction de l’ouest de 99,4 m sur une distance de 43,5 km. Entre les lacs Érié et Huron, les États-Unis ont approfondi la rivière Detroit, la rivière St Clair et le lac St Clair. Le canal de la rivière St Marys relie les lacs Huron et Supérieur. Chacune de ses quatre écluses parallèles, du côté américain, soulève un navire en direction de l’ouest de 6,4 m pour contourner les rapides de St Marys. Une écluse canadienne de 274 m de long a été ouverte à la navigation commerciale de 1895 à 1987, date à laquelle un défaut structurel dans le mur de l’écluse a forcé sa fermeture. Cette écluse a été reconstruite en tant qu’écluse plus petite (77 m) à l’intérieur de la structure d’écluse originale et a été rouverte à la navigation en 1998. Elle est exploitée par Parcs Canada dans le cadre du lieu historique national du canal de Sault Ste Marie et n’est ouverte qu’aux petites embarcations de tourisme et de plaisance.
Économie de la Voie maritime
La dépense de fonds publics pour la Voie maritime ne s’est pas faite sans opposition. La construction de la Voie maritime était considérée par les chemins de fer et les ports de la côte Est comme une concurrence déloyale subventionnée. Les expéditeurs, bien que favorables à la Voie maritime, s’opposaient à la mise en place de péages. La section originale du Saint-Laurent de la Voie maritime a coûté 330 millions de dollars au Canada et 130 millions de dollars aux États-Unis. Le Canada a versé 300 millions de dollars supplémentaires pour améliorer le canal Welland.
Le remboursement de la dette en capital, des intérêts et des coûts d’exploitation ne pouvait être couvert par les dispositions financières initiales et, en 1977, une modification de la législation a converti la dette de l’Administration canadienne de la Voie maritime en capitaux propres détenus par le Canada, mais a exigé que les revenus couvrent tous les coûts d’exploitation et d’entretien ; cette modification a porté ses fruits. Un montant supplémentaire de 600 millions de dollars, dépensé par les deux pays pour le développement hydroélectrique, a été récupéré par les ventes d’électricité.
La Voie maritime a un impact économique majeur sur le Canada et les États-Unis. Elle offre des taux de fret économiques pour les produits en vrac et apporte une contribution importante aux industries de base des deux pays. La Voie maritime a rendu possible l’exploitation des vastes gisements de minerai de fer du Québec et du Labrador, et a fait passer le Canada d’un statut d’importateur à celui d’exportateur de minerai de fer.